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AOP, IGP, Vins de France, les Vins de Nantes se conjuguent au pluriel

Si le Muscadet est la principale appellation des Vins de Nantes elle n’est pas la seule. Notre vignoble s’appuie sur une large gamme de vins, allant des appellations aux vins de France en passant par les IGP. Autant d’opportunités pour les producteurs d’étoffer leur gamme et de répondre à la demande, notamment en vente directe. Ce sera la thématique des trois prochains dossiers. On commence ce mois-ci avec un coup de projecteur sur les autres AOC produites dans le vignoble de Nantes.

Il est souvent considéré comme le petit frère du Muscadet. Il est aussi bien plus jeune puisque l’appellation d’origine contrôlée ne date que de 2011. Compagnon idéal des fruits de mer crus, le Gros Plant du Pays Nantais est l’autre emblème des Vins de Nantes. Léger, fruité, acidulé, océanique, il est pourtant en perte de vitesse depuis quelques années. De 1 300 hectares revendiqués en production il y a 10 ans, il n’en couvre aujourd’hui plus que 500, et le nombre de producteurs suit la même tendance. La raison : le manque de valorisation faisant du Gros Plant « l’appellation française blanche la moins chère de France » regrette Jean-Michel Morille, président de l’appellation.
Vendu à 80 % par le négoce, le Gros Plant et le Gros Plant sur lie souffrent de ce manque de considération. « Le Grande Distribution demande au négoce un produit bon et pas cher » poursuit le vigneron de la Chapelle Basse-Mer. « C’est à nous producteurs de montrer sa qualité. Elle s’est d’ailleurs considérablement accrue ces dernières années. On est sur un vin dans l’air du temps, plus aromatique, sans amertume. » Produit à partir de la Folle Blanche, le Gros Plant doit aussi composer avec les changements d’habitudes des consommateurs. « Ils sont de moins en moins fidèles à un produit et achètent plus au coup par coup. Pour faire en sorte que le Gros Plant séduise les acheteurs il faut être présents et cela passe par l’implication des producteurs. »

Jean-Michel Morille, président de l’AOC Gros Plant.

Tout n’est pourtant pas noir pour le Gros Plant. Certains vignerons, ceux travaillant notamment en vente directe, avec le CHR ou à l’export, valorisent le Gros Plant autant que leurs Muscadets. C’est le cas d’Eric Chevalier à Saint-Philbert de Grandlieu. Sur ses 28 hectares en production la Folle Blanche n’en occupe pas loin de 3. « J’y tiens car c’est un produit que j’aime, que j’aime goûter. Mais c’est un vin qui doit rester droit, sec, fidèle à son identité. » Vendu 6 € la bouteille, son « Bon Plan » n’est pas le seul à s’aligner sur les prix du Muscadet sur lie. En vente directe ou auprès des professionnels, le Gros Plant est davantage valorisé qu’en Grande Distribution, pas toujours sous le nom de l’AOC d’ailleurs, certains lui préférant celui du cépage, plus vendeur. « Il faut faire en sorte que le Gros Plant sur lie – et c’est le cas pour certains producteurs – soit vendu à un prix supérieur. C’est ce vers quoi il faut tendre, vers un marché de niche. »
Reste à savoir si cela sera suffisant pour maintenir les surfaces au niveau où elles sont aujourd’hui. « Nous verrons si la nouvelle délimitation de l’aire parcellaire à une incidence sachant que les parcelles plantées en vignes exclues de l’aire parcellaire délimitée* ont des dérogations jusqu’à 2021 voire 2031. Peut-être verra-t-on des relocalisations » poursuit Jean-Michel Morille. La modification de la densité de plantation de 6 500 à 5 000 pieds / hectare aura-t-elle une influence sur la production ? Pour l’heure, cette modification du cahier des charges n’a pas suscité de réclamations lors de la Procédure nationale d’opposition menée du 14 décembre au 14 février dernier. Le nouveau cahier des charges devrait donc entrer en vigueur pour la prochaine récolte.

Les Coteaux d’Ancenis prophètes en leur pays
Située à l’Est de Nantes, l’appellation d’origine contrôlée Coteaux d’Ancenis a elle aussi officiellement vu le jour en 2011. Située de chaque côté de la Loire, c’est la plus petite AOC des Vins de Nantes avec 150 hectares de vignes et une trentaine de producteurs. Elle a aussi une autre particularité : celle de produire à la fois des vins blancs, rouges et rosés. Un vin à la robe dorée, rond, aux arômes fleuris pour le Malvoisie issu du Pinot gris, frais, fruité et gourmand pour les rouges et rosé produits à partir du Gamay. La proportion de chaque couleur a toutefois évolué au fil des années, le Malvoisie gagnant peu à peu des surfaces sur celles des Coteaux d’Ancenis rouges et rosés.

« La surface revendiquée en Malvoisie atteint aujourd’hui 71 hectares contre 34 hectares il y a 10 ans. C’est bon signe d’autant que le marché a très bien réagi à cette progression » indique Pierre-Yves Huguet, président de l’appellation. Valorisé entre 6 et 7 € la bouteille, le Malvoisie est devenu l’étendard des Coteaux d’Ancenis mais les rouges et rosés ne sont pas en reste. Si les surfaces ont diminué, les ventes restent stables. « Cela fonctionne bien en vente directe. Quelques opérateurs sont également présents en Grande Distribution, en CHR et chez les cavistes. L’export lui est anecdotique. » Peu voire pas d’intermédiaires en revanche entre les producteurs et leurs clients, les Coteaux d’Ancenis ne sont quasiment pas représentés auprès du négoce. « Il y en a eu par le passé en rouge et rosé mais les marchés ont diminué et la viticulture en a moins proposé » explique Pierre-Yves Huguet. « Cela nous permet d’être maîtres de nos débouchés et de nos prix. Mais cela peut aussi faire peur à un jeune qui souhaite s’installer et qui ne voudrait pas faire de commercialisation. Cela oblige à faire du détail. » Les installations sont peu nombreuses mais régulières en Coteaux d’Ancenis, au rythme d’une par an, souvent en agriculture biologique et plus fréquentes dans la partie « Maine-et-Loire » de l’appellation. Ils sont en effet 8 Domaines installés en Loire-Atlantique et 26 dans le 49, avec la possibilité pour ces derniers de revendiquer leur production aussi bien en Vins de Nantes qu’en appellations d’Anjou.

Pierre-Yves Huguet préside l’AOC des Coteaux d’Ancenis.

Des AOC de Nantes à celles d’Anjou
Bouzillé, Drain, La Varenne, Liré, Landemont ou encore La Chapelle Saint-Florent, dans ces six communes du Maine-et-Loire on produit aussi bien du Muscadet Coteaux de la Loire et des Coteaux d’Ancenis que de l’Anjou Blanc et rouge, du Rosé de Loire et du Rosé d’Anjou, du Cabernet d’Anjou ou du Crémant de Loire. C’est le cas du Domaine des Galloires à Drain. « Cela nous permet d’avoir une gamme complète de vins » précise Louis-Charles Toublanc, vigneron. « Deux tiers des surfaces sont en Muscadet, 1/5 en Anjou et le reste en Vin de France. Toutes les AOC sont vendues en bouteilles, le bib étant réservé aux vins de France. »
Sur ces communes, le cabernet d’Anjou et le Rosé d’Anjou figuraient parmi les appellations angevines les plus produites en 2018. Le Crémant de Loire représente quant à lui 1 485 hectolitres produits par 8 vignerons frontaliers, soit 1 % de la production globale. Une part infime qui permet toutefois à ces Domaines de diversifier leur offre et qui profite aussi aux Vins de Nantes. Par le biais des dégustations, les consommateurs peuvent ainsi découvrir la large palette de vins de Loire, jusqu’aux plus océaniques.

Les Coteaux d’Ancenis sont produits sur les deux rives de la Loire. © Emeline Boileau

* Jusqu’à la récolte 2021 incluse pour les communes dont l’aire parcellaire délimitée a été approuvée en 1996 (zone Muscadet Côtes de Grandlieu) et en 2000 (zone Muscadet AC).  Jusqu’à la récolte 2031 incluse pour les communes dont l’aire parcellaire délimitée a été approuvée en mai 2017 (zones Muscadet Sèvre et Maine, Muscadet Coteaux de la Loire et communes de l’aire géographique du Gros Plant du Pays nantais situées en dehors de l’aire Muscadet)